Visite buissonnière de l’exposition « Yona Friedman, Prototype improvisé de type « nuage »
En dialogue avec le Forum d'Urbanisme et d'Architecture de la Ville de Nice, le MAMAC présente à la Galerie des Ponchettes (jusqu'au 8 janvier 2017) "Prototype improvisé de type nuage", une œuvre de l'architecte Yona FRIEDMAN réactivée suivant un protocole mis en œuvre en collaboration avec une communauté niçoise de gens de la mer.
L'ŒUVRE
Cette œuvre ouverte de l’architecte franco-hongrois Yona FRIEDMAN (Budapest, 1923), présente dans la collection du 49 Nord 6 Est - Frac Lorraine (Fonds Régional d’Art Contemporain), se réinvente en fonction des contextes et des communautés qui s’en saisissent.
Le nuage s’élabore selon un processus libre, laissant une place importante à l’imagination et à l’improvisation de celles et ceux qui l’inventent et l’activent. La communauté participante suit les instructions de Yona FRIEDMAN, dont la principale consigne est la délégation totale de la réalisation de son œuvre par les intervenants qui deviennent acteurs et créateurs. Au fil des séances de travail menées en mai et juin 2016, cette communauté a déterminé ainsi la forme, l’ampleur et le matériau qui constitue ce nuage collectif. Aucune initiation à l’art n’est requise, la part belle est laissée à l’expérience collective.
Ce projet à dimension poétique conjugue deux engagements et axes de recherches menés par Yona FRIEDMAN depuis le cœur des années 1970 : l’autoplanification et le libre arbitre d’une part (soit la possibilité laissée à des individus ou des communautés de déterminer un projet, une architecture, un espace ou des modalités de vivre ensemble), et une réflexion sur les enjeux écologiques de notre temps d’autre part, puisque le matériau choisi doit être pauvre ou recyclé.
Pour participer à cette "utopie réalisable", le choix du MAMAC s’est naturellement porté sur une communauté liée à la mer afin de faire écho à l’histoire de la Baie des Anges et celle des Ponchettes, et de l’inscrire dans l’imaginaire du territoire. Au XIXe siècle, l’ancien lavoir public situé dans la galerie était utilisé par les pêcheurs installés sur la plage voisine pour nettoyer leurs filets. Le projet permet également à travers un propos artistique, de tisser un lien privilégié et symbolique entre le musée et des habitants de Nice. Le "nuage" réalisé est à la fois une aventure collective, fruit d’échanges et d’un travail de collecte, une proposition amenant le visiteur à réfléchir au devenir des matériaux abandonnés par la société et une expérience esthétique qui transforme l’architecture du lieu, renouvelant notre regard sur ce dernier.
UN REGARD PARTICULIER : YONA FRIEDMAN ET LA CÔTE D'AZUR
Au-delà de la réactivation de cette œuvre, qui fait écho au rapport de Nice à la mer, Yona FRIEDMAN a déjà porté son regard sur le Côte d'Azur.
En 1966-1967, avec l'architecte niçois Guy ROTTIER, membre du GIAP (Groupe International d'Architecture Prospective, dont Yona FRIEDMAN justement fut l'un des fondateurs en 1965), Yona FRIEDMAN se penche – déjà – sur le territoire de la Plaine du Var.
Une véritable ville y est pensée pour 200 000 à 500 000 habitants, pourvoyant à ses besoins en alimentation grâce au maintien d'une agriculture locale, qui doit pourtant cohabiter avec des infrastructures majeures de transport, avec un immeuble linéaire de quinze étages serpentant le long du fleuve sur une longueur développée de plus de trente kilomètres et avec des tours hélicoïdales de quatre-vingt-cinq étages.
Portant la marque plus personnelle de Guy ROTTIER, cet aspect du projet se prolonge par la contribution de Yona FRIEDMAN sous la forme de deux quartiers (Venise et Ariel) construits en bord de mer (voire au-dessus de celle-ci), en lieu et place de l'aéroport, qui complètent les lieux de travail et d'habitation répartis dans la plaine par une cité de vacances pour 200 000 à 300 000 résidents. Comme l'ensemble du projet, cette proposition est pensée dans un esprit participatif ouvert aux usagers.
Venise toujours avec "La Venise monégasque", qui est le nom d'un projet antérieur de Yona FRIEDMAN pour un aménagement pensé en superstructure au-dessus du port de Monaco.
Formulée en 1959, cette proposition répond à une pénurie d'espace en Principauté que l'on anticipait face à une croissance annoncée de la population.
Une "ville spatiale", agencée de manière à ne pas gêner la vue depuis la ville existante, se présente alors comme un manifeste de l'adaptabilité à n'importe quel contexte de ce concept d'urbanisme tridimensionnel, posé comme en lévitation au-dessus du "déjà là". À Monaco, la proposition de Yona FRIEDMAN prend un relief particulier en ce qu'elle entre en résonance avec les autres utopies prospectives pensées pour ce territoire à la même période par Archigram, Paul MAYMONT ou Manfredi NICOLETTI, qui firent de ce lieu, le temps d'une parenthèse historique optimiste, un laboratoire d'idées dont le souvenir s'estompe peu à peu comme dans un flou. À la manière d'un nuage.
77 quai des États-Unis, 06300 Nice, Alpes-Maritimes, Provence-Alpes-Côte d'Azur
Alpes-Maritimes, Provence-Alpes-Côte d'Azur