L’agence d’architecture et de design Atelier Aïno (www.atelier-aino.com) cherche à réconcilier l’habitant et le bâti par une approche sociale et environnementale. L’atelier se compose de Charlotte Lovera et Élise Giordano architectes, associées à Louise Dubois, designer matériau, lauréates des AJAP 2018.
Conférence proposée dans le cadre des rencontres architecturales de Saint-Raphaël (Var) en partenariat avec le CAUE83, la ville de Saint-Raphaël et la MAV PACA.
PORTRAIT dans le cadre des AJAP 2018
Helsinki, septembre 2010 : Charlotte Lovera, Élise Giordano et Louise Dubois s’installent dans leur colocation Erasmus. Les apprenties architectes et l’élève des arts décoratifs ne se connaissent pas. L’année sera déterminante. À la Aalto University, pas de champs disciplinaires hermétiques, les jeunes femmes s’essaient donc ensemble aussi bien à la micro-architecture qu’aux métiers à tisser. De retour à Paris, elles prolongent la colocation, planchent sur leurs diplômes côte à côte. Leurs démarches fusionnent : Élise s’intéresse à la conception participative de Patrick Bouchain, Charlotte à la survie des pratiques urbaines informelles dans l’aménagement, Louise colonise le parvis de la mairie de Créteil avec du textile. Chacune expérimente le projet spatial comme acte social et solidaire construisant l’histoire humaine et bâtie. Passage obligé des jeunes diplômés, l’agence d’architecture est un « choc thermique ». Alors elles contrebalancent par des engagements associatifs. Avec la scénographe Carine Ravaud, Élise participe à la résidence « Territoires pionniers ». À Sainteny (Manche), elle teste la mobilisation habitante en récoltant les « bruits qui courent », ces anecdotes, ferments de la vie collective. Toutes les trois, elles s’engagent dans la démarche Enerterre, découvrent le « troc de temps » en s’impliquant bénévolement dans la rénovation de foyers modestes en échange d’une formation sur la construction en terre. Ces expériences fondent leur collaboration professionnelle : deux architectes et une designer textile, leur association est unique, aïno en finnois. L’atelier est une scop calibrée pour garantir sa transdisciplinarité, s’assurer que la capacité de manipulation de la matière des designers complète celle des architectes à extrapoler une problématique locale. Chez Aïno, le temps est un matériau, l’habitant un artisan, le déchet une ressource. L’autoconstruction a droit de cité quel que soit le budget pour humaniser le projet, investir sa part sensible. Pour réhabiliter le mur en pierres sèches d’un cabanon de vacances près de Nice, le calcul est vite fait : un chantier participatif coûte 3 fois moins cher en temps et en argent que de faire travailler seul un professionnel. Les savoir-faire pour entretenir ces ouvrages traditionnels disparaissant, l’appel aux bonnes volontés est un succès. Le matin, l’artisan forme les volontaires, qui construisent l’après-midi. En dynamisant les liens avec les habitants, Aïno se pose en maître d’œuvre de la mémoire, charge les lieux de souvenirs. Son travail sur la matière y participe. Les vieilles tuiles du cabanon ont été concassées et la terre cuite coulée dans la chape de la terrasse. Du motif au territoire, Aïno embrasse toutes les échelles de la création.
Charlotte Lovera (1987) et Élise Giordano (1987) sont diplômées des Écoles nationales supérieures d’architecture Paris-Malaquais et Paris-La Villette en 2013. Louise Dubois (1989) est diplômée de l’École nationale supérieure des arts décoratifs de Paris en 2012. Elles fondent l’Atelier Aïno à Marseille en 2016.